Abus de droit fiscal et clauses anti-abus : définition, et champs d’application.
La notion d’abus de droit en matière fiscale englobe plusieurs concepts définis par des articles qui parfois cohabitent, parfois se substituent l’un l’autre.
L’article L64 du LPF définit et sanctionne l’abus de droit fiscal
L’article L64 A du LPF qui entrera en vigueur au 1er janvier 2021 ne s’appliquera pas à l’IS mais sera d’un champ d’application plus vaste quant au caractère des actes contestés par l’administration.
Les clauses anti-abus :
Les articles 205 A et 210-0 A du CGI définissent respectivement quant à eux, les notions de clauses anti-abus, générale OU spécifique.
Selon l’article 205 A du Code général des impôts (CGI), pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, pour l’établissement de l’impôt sur les sociétés, l’administration fiscale peut écarter un montage ou une série de montage qui a été mis en place dans l’objectif principal d’obtenir un avantage fiscal allant contre l’objet ou la finalité des règles fiscales et qui n’est pas authentique.
L’article 205 A du CGI considère un montage comme non authentique « s’il n’est pas mis en place pour des motifs commerciaux valables reflétant la réalité économique ».
La doctrine administrative est venue apporter des précisions sur les modalités d’articulation d’une telle clause avec les autres dispositifs anti-abus et notamment l’abus de droit fiscal des articles L. 64 et L. 64 A du Livre des procédures fiscales (LPF) et la clause anti-abus spécifique de l’article 210-0 A du CGI.
Cas où l’application de la clause anti-abus générale de l’article 205 A du CGI est écartée :
La clause anti-abus de l’article 205 A du CGI est une clause générale. Elle s’applique donc sous réserve de la clause anti-abus spécifique de l’article 210-0 A III du CGI qui s’applique quant à elle dans le cadre d’opérations de fusion, de scission ou d’apport partiel d’actif.
L’article 205 A du CGI est donc écarté dans deux cas :
· Au profit de l’article 210-0 A III du CGI dans le cadre d’opérations de fusion, de scission ou d’apport partiel d’actif.
· Lorsque l’administration ne répond pas à un contribuable de bonne foi dans un délai de 6 mois dans le cadre d’un rescrit fiscal préalablement à la réalisation d’une opération.
Articulation entre l’article 205 A du CGI et l’article L. 64 du LPF :
L’article L. 64 du LPF traite de l’abus de droit fiscal.
Celui-ci se définit comme les actes à caractère fictif ou comme les actes mis en place dans le but exclusif d’éluder l’impôt. Ces actes sont écartés par l’administration qui les considère inopposables.
L’abus de droit fiscal défini à l’article L64 du LPF se distingue de la clause anti-abus générale de l’article 205 A du CGI :
· L’abus de droit fiscal est une règle répressive qui entraine l’application d’une pénalité de 80% (article 1729 du CGI), qui peut être rapportée à 40% si le contribuable n’est pas à l’origine des manœuvres frauduleuses.
· Les clauses anti-abus sont, quant à elles des règles d’assiette de l’impôt sur les sociétés qui permettent d’écarter les montages du fait de leur caractère principalement fiscal et d’appliquer des redressements le cas échéant. Néanmoins, ces clauses n’entrainent pas par elle-même l’application de sanctions fiscales. La clause anti-abus générale est une règle d'assiette de l'impôt sur les sociétés, insérée en tant que telle à l'article 205 A du CGI. Elle est distincte de la procédure de l'abus de droit fiscal de l'article L. 64 du LPF, qui permet à l'administration d'écarter les actes fictifs ou à but exclusivement fiscal et qui prévoit des garanties et des sanctions spécifiques applicables en cas de montages abusifs. L’application de l’article 205 A du CGI est aussi plus étendue que celle de l’article L. 64 du LPF car les clauses anti-abus traitent de montages dont l’objectif est « principalement » fiscal alors que l’abus de droit traite de montages dont l’objectif est « exclusivement » fiscal.
L’article 205 A du CGI ne modifie pas les dispositions de l’article L. 64 du LPF. Elle constitue une condition supplémentaire des modalités de détermination de l’impôt sur les sociétés. C’est aussi le cas des clauses anti-abus spécifique au régime des sociétés mères comme l’a jugé le Conseil Constitutionnel dans sa décision du 29 décembre 2015.
Les deux dispositifs coexistent en pratique.
Articulation entre l’article 205 A du CGI et l’article L. 64 A du LPF :
L’article L. 64 A du LPF entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2021, mais son application sera rétroactive au 1er janvier 2020. Cet article vise à étendre l’abus de droit aux opérations ayant un motif principalement fiscal et non plus exclusivement fiscal.
Ces actes seront écartés par l’administration. La définition de l’abus de droit fiscal se rapproche donc de celle des clauses anti-abus définis à l’article 205 A du CGI.
Remarque importante :
- La procédure de l’article L. 64 A du LPF va s’appliquer à tous les impôts à l’exception de l’impôt sur les sociétés.
- Les clauses anti-abus générales ne visent quant à elles que l’impôt sur les sociétés.
Les deux dispositifs seront donc complémentaires.