La proposition de rectification : procédure, contenu et effets
Sources : Francis Lefebvre et Me Arnaud Soton
Lors d’un contrôle fiscal, qu’il soit professionnel (vérification de comptabilité) ou personnel (examen contradictoire de la situation fiscale personnelle), l’administration doit toujours faire parvenir au contribuable vérifié, une proposition de rectification qui l’informe de la modification de son imposition.
De plus, la proposition de rectification doit respecter un certain cadre et à défaut, elle peut être irrégulière.
· La proposition de rectification doit être motivée (article L.57 du LPF).
Cette motivation doit expliquer la nature et les motifs de la rectification envisagée par l’administration. La motivation de la proposition de rectification permet au contribuable de savoir exactement ce qui lui est reproché et de répondre à l’administration. Pour être clairement motivé, l’administration doit établir clairement les faits afin d’en tirer des éléments de droit et, de facto, les conséquences fiscales.
· La proposition de rectification doit indiquer le délai de réponse.
Le contribuable a trente jours à compter de la réception de la proposition de rectification pour y répondre (article R.57-1 du LPF). Il peut cependant demander une prorogation du délai. Il aura alors soixante jours pour répondre. Cette prorogation est de droit dans le cadre d’une procédure contradictoire.
Le contribuable peut accepter la rectification ou présenter ses observations dans ce délai. Celui-ci doit apparaitre sur la proposition de rectification. A défaut, la procédure est irrégulière selon l’arrêt du Conseil d’Etat du 11 juillet 1984.
· La proposition de rectification doit indiquer la possibilité de se faire assister d’un conseil (article L.54 du LPF)
Le contribuable vérifié a le droit de se faire assister d’un conseil de son choix dans le cadre de la procédure de vérification. Ce droit doit être mentionné sur la proposition de rectification sous peine de nullité de la proposition de rectification.
· La proposition de rectification doit être datée et signée.
Concernant la date, la Cour d’appel de Nancy a jugé le 4 avril 2002 que « le fait que la date dactylographiée sur la proposition de rectification ait fait l'objet d'une rectification manuscrite est sans incidence sur la régularité de la procédure ».
Concernant la signature, c’est l’agent chargé de la rédaction de la proposition de rectification qui doit signer la proposition de rectification. Il doit aussi indiquer son nom et son grade. Lorsque des majorations sont appliquées pour manquement délibéré, manœuvres frauduleuses, abus de droit fiscal ou opposition à contrôle fiscal, le visa et le nom de l'inspecteur Divisionnaire des Finances Publiques apparait aussi sur la proposition de rectification.
Lorsque la proposition de rectification respecte ces exigences, elle est valable et entraine des conséquences financières. L’administration doit indiquer dans la proposition de rectification le montant des droits, des taxes et des pénalités (article L.48 du LPF).
En effet, au-delà du montant des droits en principal, le contribuable peut devoir s’acquitter d’amendes, de majorations et/ou d’intérêts de retard.
o Les amendes
Elles sanctionnent un défaut de diligence ponctuelle du contribuable. Une amende est appliquée, par exemple, lorsque le contribuable dissimule ou modifie l’adresse d’un fournisseur ou d’un client (article 1737 du CGI).
o Les majorations
Le contribuable peut devoir s’acquitter de majorations dans de nombreux cas. Le montant est majoré notamment lorsque le contribuable ne produit pas de déclaration, qu’il la produit en retard ou que la déclaration est insuffisante.
o Les intérêts de retard
Lorsque la créance fiscale n’a pas été acquittée par le contribuable dans le délai légal, il devra verser des intérêts de retard (article 1727 du CGI).
La proposition de rectification est en principe notifiée par voie postale en recommandé avec avis de réception mais rien ne l’impose. L’administration peut donc utiliser d’autres voies de notification.
Aucune disposition expresse ne régit non plus le délai de notification. L’envoi peut donc être fait jusqu’à l’expiration du délai de prescription.
La proposition de rectification est adressée au contribuable lui-même, sauf s’il désigne une personne à qui l’adresser. Dans le cas d’une entreprise, elle lui est notifiée par le biais de son représentant légal. C’est aussi le cas dans le cadre d’une liquidation judiciaire, la proposition de rectification est adressée au liquidateur.
Le droit de reprise de l’administration est encadré par un délai. La prescription du droit de reprise de l’administration est de trois ans mais il est exceptionnellement porté à quatre ans pour l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux établis au titre des revenus de l’année 2018. Le délai peut aussi être de dix ans selon l’article L.169 du LPF en cas d’exercice d’une activité occulte ou en cas de flagrance fiscale.
La réception de la proposition de rectification vient interrompre le cours de la prescription du droit de reprise de l’administration. Le délai est donc entièrement reconstitué.
Le contribuable peut accepter la rectification proposée par l’administration. L’acceptation peut être formelle, c’est-à-dire que le contribuable accepte la proposition de rectification en tant que tel. Le silence du contribuable pendant trente jours est considéré comme une acceptation de la proposition de rectification. L’acceptation peut aussi être sous condition, comme une transaction par exemple.
L’acceptation met fin à la procédure avec l’édiction par l’administration d’une nouvelle imposition sur les bases rectifiées.
Le contribuable peut, a contrario, ne pas accepter la proposition de rectification. Il présente alors ses observations. La loi n’impose aucune condition de forme mais le Conseil d’Etat a jugé que la réponse devait être écrite.
Les observations peuvent être un refus pur et simple de la proposition de rectification ou comporter une argumentation. L’argumentation devra être étayée de pièces justificatives. Si certains éléments ne sont pas contestés, ils peuvent être considérés comme tacitement acceptés.
L’administration devra répondre aux observations du contribuable. L’administration peut accueillir les observations du contribuable et baisser les rectifications. Elle peut au contraire ne pas accepter les observations. Elle devra alors y répondre de manière motivée (article L.57 alinéa 5 du LPF). L’absence de réponse de l’administration aux observations du contribuable constitue une irrégularité de procédure qui entraine la décharge des impositions supplémentaires si cette absence de réponse prive le contribuable de la possibilité de connaitre les motifs justifiant le maintien des rectifications.
Dans le cas où l’administration refuse les observations du contribuable, ce dernier peut actionner des voies de recours internes à l’administration. Ce sont les voies de recours précontentieuses. Le contribuable peut donc former un recours hiérarchique auprès du supérieur hiérarchique du vérificateur ou auprès de l’interlocuteur départemental si le recours auprès du supérieur hiérarchique n’a pas découlé sur un aboutissement favorable au contribuable.
Par ailleurs, le contribuable peut saisir une commission administrative des impôts en cas de désaccord sur les rectifications (article L. 59 du LPF). Il dispose d’un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition de rectification pour informer le vérificateur de son intention de saisir la commission administrative des impôts qui relève de sa compétence.
L’administration doit donc dans ce cas soumettre le litige à l’avis de la commission compétente. La commission ne peut traiter que des questions de fait et dans le cadre d’une procédure de rectification contradictoire, elle ne peut intervenir que pour les matières pour lesquelles son intervention est prévue.
La proposition de rectification est donc largement encadrée par diverses conditions de forme. La réponse du contribuable à la proposition de rectification est aussi organisée, tout comme les recours que le contribuable peut former.
Lorsqu’aucun accord n’est trouvé entre l’administration et le contribuable vérifié, une réclamation contentieuse est possible et elle peut aboutir, si le désaccord persiste encore, sur un recours devant le juge.